mardi 9 avril 2019

Clorinde, ma colocataire (24)


Elle était passée chez ses parents.
– Cet après-midi. Vite fait.
– Et alors ?
– Ils m’ont mis une de ces soufflées ! Ils veulent que je parte de chez vous. Soi-disant que ça suffit de vous envahir. Que maintenant il faut que je m’en aille. Que je trouve quelque chose ailleurs.
– Laisse-les dire !
– Oui, mais non ! Il va bien falloir. Parce qu’ils vont pas arrêter de me tanner sinon. Jusqu’à ce qu’ils aient obtenu gain de cause.
– Tu va pas partir ?
Je l’ai crié.
Et elle s’est jetée à mon cou.
– Votre tête ! Non, mais votre tête ! Et comment vous avez dit ça ! Vous êtes trop adorable. Ah, vous y tenez à moi, hein ! Mais non, je vais pas partir, non ! Enfin, si ! Mais non quand même ! Attendez ! Que je vous explique…
Elle s’est servi un grand verre de jus d’orange qu’elle a avalé d’un trait.
– Vous vous rappelez l’hôtel, l’autre jour ?
Évidemment que je me rappelais.
– Et vous avez pas fait attention ?
– À quoi ?
– Juste en face de la porte par où elle est entrée, la fille qui vous avait tapé dans l’œil, de l’autre côté de la rue, au deuxième étage, il y avait un panneau « À louer. » J’ai téléphoné. Demain je vais le visiter. Et je vais le prendre. Je m’en fous, de toute façon, je l’habiterai pas. Et comme ça, au moins, ils seront contents, mes parents. Non, et puis ce qu’il y a aussi, c’est que ça nous fera un petit pied à terre, à tous les deux, si on veut. On sera aux premières loges pour voir ce qu’il s’y passe dans cet hôtel. Les entrées. Les sorties. On pourra surveiller. Et, si ça nous chante, essayer d’en savoir plus. Sur les uns. Sur les autres. Sur la fille aussi, si elle revient. Non, je sens que je vais adorer, moi… Pas vous ?
Moi aussi, oui.

– Encore lui !
– Martial ?
– Évidemment, Martial.
– Vous répondez pas ?
– Il y a pas le feu. Qu’on puisse finir de dîner en paix. Ça lui fait pas de mal n’importe comment de mariner un peu.
– Le pauvre ! Il doit être en train de tirer une langue de douze kilomètres sur mes nénés. Vous êtes un sans-cœur.
– À propos, c’est quand qu’on lui montre tes fesses ?
– Oh, pas tout de suite ! Chaque chose en son temps. Faut l’inviter ici avant. Que je le voie d’abord en train de penser qu’il les a vus, mes seins. Et leur jeter des regards à la dérobée. Surtout que… je sais déjà ce que je vais m’habiller.
– Je crains le pire.
– Oh, vous pouvez… Parce que je vais faire fort. Il va pas débander de tout le repas. Bon, mais allez, rappelez-le !
– Pour lui dire quoi ?
– Je sais pas. Improvisez ! Que j’aie la surprise, moi aussi.

Il a décroché tout de suite.
– Elle est où ? Sous la douche ?
– Non. Dans sa chambre. Avec un type.
– C’est qui ?
– Ah, ça, j’en sais rien. C’est la première fois que je le vois.
– Ils baisent ?
– Pas pour le moment.
– Mais ils vont le faire. Sûrement. Va ! Va écouter. Tu me raconteras.

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