Elle
m’a à peine laissé le temps de refermer la porte. Elle m’a
quasiment sauté dessus.
– Vous
savez, ma copine Emma ?
– Celle
qui t’a fait découvrir tant et tant de choses ?
– Elle-même.
Eh bien, à force que je lui parle de vous, elle voudrait vous
connaître…
– Rien
de plus facile.
– Pas
tellement, non. En ce moment, elle est au Guatemala.
– Vu
comme ça, effectivement…
– Pour
son boulot. Elle est photographe. Ce qui l’arrange bien. Ce qui l’a
toujours bien arrangée. Parce que, du coup, quand elle a envie de
savoir comment un mec est fait, eh ben il lui suffit d’invoquer une
histoire de projet artistique quelconque. En général, ça marche.
Tant et si bien qu’à l’arrivée elle se retrouve avec des
monceaux de photos toutes plus évocatrices les unes que les autres.
– Tu
les as vues ?
– Certaines,
oui. Faut reconnaître qu’elle a du goût et qu’en général ils
sont sacrément bien foutus, les types.
– Et
bien montés, j’imagine.
– La
plupart. Bon, mais tout ça pour dire qu’en attendant de vous voir
en chair et en os, ce qu’elle voudrait, c’est que je lui envoie
des photos de vous. Aussi précises et explicites que possible. « Je
pourrai bien me le représenter, comme ça, quand tu m’en parleras.
– Ben,
tiens !
– Ça
vous pose problème ?
– Tu
penses bien que oui.
– Ce
dont je me fiche complètement ! Allez, hop, à poil !
– Ça
presse vraiment tant que ça ?
– Un
peu que ça presse. On a parlé de vous tout l’après-midi.
– Je
vois…
– Vous
voyez rien du tout. Bon, alors, ça y est ? Vous y êtes ?
– Et,
bien sûr, dans un souci d’équité, elle va me rendre la pareille,
ton Emma… M’offrir ses charmes à contempler.
– C’est
prévu. Entre autres…
– Entre
autres ? C’est-à-dire ?
– Vous
verrez bien. Ce sera plus une surprise sinon… Tenez, allez vous
mettre là-bas ! Dans la lumière. On va commencer par en faire
en pied. Qu’elle ait une vue d’ensemble. Attention, bougez plus,
le petit oiseau va sortir. Super ! Tournez-vous maintenant !
Côté pile. Et là, faut pas que je me loupe. Parce que les fesses,
elle adore ça. Comment elle va halluciner, les vôtres ! Non,
c’est vrai, elles tiennent vraiment la route. Surtout pour dire que
vous avez quarante-six ans. Bien fermes. Bien musclées. On en
mangerait. Bougez pas ! Restez comme ça. En gros plan, ce
coup-ci. Attendez ! Attendez ! Faut qu’on mette la dose.
On va la gâter. Après tout ce qu’elle a fait pour moi, Emma…
Là, ça devrait être bon ! Il y a de quoi faire. De toute
façon, au pire, je vous ai sous la main. Bon, allez, on zoome sur le
morceau de choix ? Oh, mais c’est que c’est la forme, on
dirait ! Elle vous fait de l’effet, cette petite séance
photo, n’empêche ! On en profite. On mitraille. En tout cas,
elle va apprécier. Sûr qu’elle va apprécier. Oui, bon, mais
maintenant, si vous pouviez arrêter de bander, ce serait sympa. Que
je puisse vous l’avoir aussi au repos. Et, après, à toutes les
étapes quand elle remonte. De quoi on pourrait parler pour la faire
redescendre ? De politique ? De la tectonique des plaques ?
Du linéaire B ? Ça vous fait rigoler, oui, mais ça vous fait
pas débander pour autant. Alors, vous savez pas le mieux ? Ce
sera que je vous la prenne par surprise. Quand elle sera toute molle.
Au moment où vous vous y attendrez le moins. En attendant, je vais
déjà lui envoyer ça à Emma. C’est déjà pas si mal. C’est
même l’essentiel. Elle pourra en faire son quatre heures. Et on
aura du concret pour discuter toutes les deux. Sans compter que moi
aussi, maintenant, je vais vous avoir constamment à disposition. Et
que je pourrai profiter de vous quand ça me chantera. Même derrière
votre dos, si j’ai envie. C’est pas super, ça ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire