Mégane n’était pas sur le terrain. Elle s’était réfugiée à
l’intérieur. Et elle pleurait à chaudes larmes.
– Ben,
qu’est-ce qui vous arrive ? C’est quoi, ce gros chagrin ?
– Rien.
C’est rien.
– Mais
si ! Dites !
– C’est
que…
Et
ses larmes ont redoublé. Se sont transformées en sanglots.
– Allons !
Allons !
Je
l’ai prise dans mes bras. Elle s’est abandonnée contre moi. Je
lui ai doucement caressé la joue. La tempe. La nuque.
Elle
s’est calmée, a relevé la tête, m’a souri à travers ses
larmes.
– Venez
vous asseoir. Venez !
Sur
le banc à côté des casiers. Je lui ai pris la main, ai entrecroisé
mes doigts avec les siens. Elle m’a encore souri.
– C’est
votre mari, hein !
Elle
a fait signe que oui. Oui.
– Il
a été odieux. Plus bas que terre il m’a mise. Que je suis
invivable. Que personne pourrait me supporter. Personne. Et qu’il
se demande ce qu’il fout encore avec moi.
Elle
s’est tue. J’ai posé sa main sur ma cuisse. Elle l’y a
laissée, a levé sur moi un regard bouleversé.
– Vous
me trouvez moche, vous ?
– Jamais
de la vie ! Vous êtes mignonne comme tout.
– Vous
dites ça pour me faire plaisir.
– Je
vous assure que non.
– C’est
gentil. Et ça fait du bien. Parce que c’est pas facile à vivre,
vous savez, quand votre mari vous trouve tous les défauts du monde.
– Oui,
mais enfin, il a pas toujours dit ça…
Clorinde
s’est étirée.
– Oui.
Bon, bref. Vous avez fait la causette. Un bon bout de temps. Elle, à
se lamenter. Et vous, à la consoler. Et puis après, vous l’avez
embrassée. Non ?
– Un
peu.
– Tu
parles ! Je suis bien tranquille que vous vous êtes roulé
pelle sur pelle un sacré moment, oui ! Et que vous, vous, en
avez profité pour laisser traîner vos paluches ici et là. C’est
pas vrai peut-être ? Bon, mais alors finalement, vous l’avez
décroché le jackpot ou pas ?
– Sur
le banc, avec le risque que quelqu’un déboule à tout moment, les
conditions n’étaient pas vraiment idéales.
– Et
donc, la partie de jambes en l’air est reportée à une date
ultérieure. C’est pour bientôt ?
– On
doit déjeuner, demain midi, dans une petite auberge de campagne, à
l’écart de tout.
– Avec
des chambres au-dessus, j’imagine. Je suis pas sûre que ce soit
une bonne idée.
– Ah,
non ? Pourquoi ?
– Parce
que vous n’avez plus vingt ans. Et qu’une rude soirée vous
attend. J’ai invité Alexandra.
– Oui,
mais Alexandra…
– N’attend
que ça. Vous entendriez comment elle parle de vous. « J’ai
jamais eu autant envie avec un type. Jamais. Rien qu’à le voir,
rien qu’à penser à lui, tu peux pas savoir ce que ça me fait.
Non, mais comment il est séduisant, c’est de la folie. Et patati
et patala. » Vous allez quand même pas la laisser dans cet
état-là ! Ce serait inhumain. Et puis, de toute façon, vous
aurez pas le choix.
– Comment
ça ?
– Je
recevrai un coup de téléphone urgent. Et je serai obligée de vous
laisser tous les deux.
– T’as
calculé ça avec elle, je suis sûr.
– Ben,
évidemment !
– Tu
es démoniaque.
– Comme
si vous le saviez pas déjà !
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