Elle m’a sorti du lit manu militari.
– Allez,
hop, debout, grand feignant ! Le devoir nous appelle.
Et
le devoir pour elle, c’était…
– Tes
cours à la fac ?
– Vous
avez pas d’autres idioties à dire ? Non, vous savez le
grossiste en sapes où je me fournis d’habitude, là, qu’a pas le
droit de vendre aux particuliers normalement, mais bon, il y a des
arrangements quand on sait s’y prendre, eh ben je lui en ai parlé
à Alexandra. Elle est intéressée. Tu parles ! Il y a de quoi.
Quand on voit les prix… Et donc, on doit se retrouver toutes les
deux à dix heures là-bas. Et vous, pendant ce temps-là, j’ai pas
de conseils à vous donner, mais moi, à votre place, vu qu’on est
mardi et que, mardi dernier, elle y était la femme de son amant à
Alexandra, ben j’irais faire un saut du côté du club de pétanque.
Elle
était effectivement là, seule, à s’entraîner. Et m’a souri,
quand elle m’a vu, à travers le grillage.
– Les
papiers sont prêts, si vous voulez…
– Eh
bien, allez !
Je
suis entré. J’ai signé. Trois feuilles. Quatre feuilles.
– Là !
Vous v’là en règle. Il vous reste plus qu’à venir jouer.
– Comme
je vous l’ai dit, je débute. Je débute vraiment.
– Oui,
oh ben, on a tous commencé par là, hein ! Vous vous y mettrez
vite, vous verrez.
Elle
a glissé le dossier dans un tiroir.
– Je
peux vous demander, si c’est pas indiscret, ce qui vous a amené à
la pétanque ?
– Je
m’encroûtais. Fallait absolument que je fasse quelque chose.
– Pourquoi
spécialement la pétanque ?
– Et
pourquoi pas ?
Clorinde m’a jeté un petit regard tout à la fois amusé et inquisiteur.
– Et
après ? Vous êtes allé jouer avec elle, j’parie.
– Comment
tu le sais ?
– Longtemps ?
– Toute
la matinée.
– Et
vous avez discuté. Elle vous plaît ? Oui, je le vois bien à
votre air qu’elle vous plaît. Ben, faut pas vous gêner, hein, si
elle vous tente. Elle est cocue. Ce sera jamais qu’un prêté pour
un rendu. Et puis vous pourrez me raconter comme ça.
– Et
toi ? Alexandra ?
– Oh,
ben, ça s’est super bien passé, Alexandra. Mais bon, il y avait
pas de raison. De toute façon, nous, les nanas, dès qu’on a le
nez dans les sapes, on est tout de suite complices. On est allées
manger toutes les deux du coup, à midi. Et on a parlé. De vous.
Entre autres.
– De
moi ?
– Oui.
Qu’on vivait ensemble tous les deux. Mais qu’on couchait pas.
Elle arrivait pas à y croire. « Un type de son âge !
Avec une petite jeune comme toi. Mignonne comme tout en plus !
Et il tente rien ? Il est impuissant. C’est pas possible
autrement. » Ça m’a fait rire. Vous l’étiez pas, non. Je
suis pas entrée dans les détails de ce qui se passe entre nous, ça
la regarde pas, mais ce qu’il y avait de sûr, c’est que vous
l’étiez pas. Ah, non, alors ! Du coup, elle brûle d’envie
de vous connaître. « Je voudrais bien voir à quoi il
ressemble, cet oiseau rare ! » Mais ça, rien de plus
simple, non ? Et comme il faut battre le fer tant qu’il est
chaud, je l’ai invitée demain soir. Chez vous. Ce sera mieux. Ça
en jettera plus. Vous avez rien contre ?
– Bien
sûr que non !
– J’en
étais sûre. Et vous savez ce que j’ai fait après ? Juste
après l’avoir quittée ? Je suis allée voir son amant.
Henri. J’avais un besoin urgent d’être magnétisée.
– Ben,
voyons !
– Il
m’a un peu draguée. Juste un peu. Et je me suis laissée faire.
C’est vilain, hein ?
– Tu
es infernale.
– C'est ce qui fait mon charme.
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