mardi 18 décembre 2018

Clorinde, ma colocataire (8)


Le lendemain était un dimanche.
Elle s’est levée tôt. Beaucoup plus tôt que d’habitude.
– Ça va ce matin ?
– Oh, oui, ça va, oui. Nickel.
Avec un petit sourire mutin.
– Ce que je ne comprends pas…
– Je sais ce que vous allez dire, je sais.
– C’est que, l’autre nuit, t’es rentrée avec un garçon et calme plat. Silence radio. Alors qu’hier soir…
– J’étais toute seule et…
– Un véritable tsunami. Ah, pour donner ça a donné.
– Ben, oui, qu’est-ce que vous voulez ! On maîtrise pas toujours tout.
– L’effet Martial ? Évidemment, l’effet Martial. Bien sûr, l’effet Martial. Tu racontes ?
– Hein ? Oh, non ! Non !
– Alors c’est moi qui vais le faire. D’abord, tu as imaginé que tu repartais faire des courses, mais toute seule cette fois. À la caisse, il est venu déposer ses achats sur le tapis, juste derrière les tiens. Il t’a reconnue. Tu l’as reconnu. Un bref bonjour. Il t’a demandé comment j’allais. « Oh, bien ! Bien ! » Et tu ne t’es plus préoccupée, en apparence, que de remettre tes courses dans ton chariot, le plus vite possible, mais, en réalité, tu ne pouvais penser qu’à lui, qu’à ses regards qui se gorgeaient de toi, qui profitaient de ce que tu avais le dos tourné pour s’en rassasier. Tu le savais. Tu le sentais. Qu’ils étaient bons ses regards ! D’admiration. D’émerveillement. De désir. Tu les ignorais superbement, mais qu’ils étaient bons ! Comment ils te troublaient ! Au-dehors, tu as mis une éternité à ranger tes achats dans le coffre pour lui laisser le temps de régler les siens, de surgir à son tour sur le parking, de s’installer au volant de sa voiture garée là, quelque part, derrière toi, d’enfouir sa main dans son pantalon en te dévorant des yeux et de donner libre cours à son plaisir. Et c’est alors que le tien t’a emportée. C’est pas comme ça que ça s’est passé ?
– Un peu, mais pas tout-à-fait quand même.
– C’était pas au super marché d’hier ?
– Si ! Sauf que j’étais beaucoup plus coquine et audacieuse que ça. Je suis montée à côté de lui dans la voiture et je l’ai regardé faire.
– J’aurais dû m’en douter. Tu l’as touché ?
– Des yeux. De tout près.
– Et c’est là que t’es venue.
– On devrait arrêter d’en parler. Ça me redonne trop envie.
– Je vois ça, oui ! Ta petite culotte te trahit.
– Hein ? Oh, là là, oui ! Et vous ?
– Quoi, moi ?
– Vous allez quand même pas me dire que vous êtes resté les mains sagement jointes sur la couverture alors qu’à côté j’étais en train de brailler comme une forcenée ?
– Non. De toute façon, tu ne me croirais pas.
– Ah, ça, c’est sûr ! Vous pensiez à quelque chose ?
– À rien de précis. Tu m’as pris de court. Alors j’ai juste laissé flotter des images.
– De moi ?
– Ben oui, de toi. Vu les circonstances, ça s’imposait, non ?
– C’était quoi ?
– Toi, à la piscine. Toi, toute nue devant le lavabo de la salle de bains. Toi, affalée sur le canapé avec la culotte qui te rentrait dans la raie des fesses.
– Vous m’avez imaginée en train de me le faire ?
– C’était le moment ou jamais.
– Quand c’est que vous avez spermé ? En même temps que moi ?
– Un tout petit peu après.
– Et d’habitude ? Quand je vous oblige pas à vous précipiter… Vous vous en inventez des histoires ?
– Toujours.
– Je suis dedans ?
– Très souvent.
– Vous me les raconterez ?
– On verra.
– Ah, ben si, si ! Ce serait normal. Je suis quand même la première concernée, non ?
– On verra, j’te dis !
– Bon, ben, en attendant, vous savez pas ? Comme c’est dimanche, je vais retourner paresser un peu au lit, moi.
Elle a laissé la porte entrebaîllée. D’un tout petit demi-centimètre.

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