– On
descend pas déjeuner ?
– Non.
Ce matin, on se fait servir dans la chambre.
– Par
Eugénie ?
– Évidemment,
par Eugénie… Ça t’a pas déplu, avoue, la petite séance d’hier
soir, hein ?
– Je
serais difficile.
– Et
t’es pas au bout de tes surprises. Elle est très joueuse, cette
petite. Et pleine de ressources.
– C’est-à-dire ?
– Tu
verras bien.
– Mais
si, dis ! Au moins un peu.
Il
y a eu du bruit dans le couloir. Puis dans la chambre d’à côté.
Encore dans le couloir.
– Tiens,
ben la v’là justement !
Elle
a frappé, est entrée, vêtue de son petit tablier de serveuse
blanc.
– Bonjour !
Avec
un grand sourire.
Et
elle nous a tourné le dos pour aller déposer le plateau sur la
table, près de la fenêtre. Ses fesses étaient nues. Totalement
nues. Superbement nues. Elle a pris tout sont temps, fait mine de
rectifier la position des tasses, celle des couverts avant de
majestueusement naviguer vers la porte sur le pas de laquelle elle
s’est retournée.
– Bonne
journée…
– À
toi aussi…
Alyssia
a hoché la tête.
– Elle
doit être ravie. C’est un fantasme qu’elle rêvait de réaliser
depuis tellement longtemps…
– Si
elle en a d’autres comme ça, je suis preneur.
– Oh,
oui, qu’elle en a d’autres ! Des quantités…
– Inutile
que je te demande lesquels, j’imagine ?
– Inutile,
en effet ! Tu les découvriras en temps voulu.
On
s’est levés.
– En
tout cas, ce qu’il y a de sûr, c’est que tu bandes !
– Ben…
Il y a de quoi, non ? Mais tu sais ce que je me demande ?
Elle est quand même pas redescendue aux cuisines dans cette tenue ?
Si ?
– Ah,
ça te plairait, ça, hein ! Et à elle aussi, sûrement !
C’est malheureusement pas possible. Pour des raisons évidentes.
Non. En fait, la chambre d’à côté, qui est vide ce matin, lui a
servi de vestiaire.
Son
téléphone a vibré.
– Benjamin…
Ce cher Benjamin… Allô, oui…
Elle
a mis le haut-parleur.
– Alyssia ?
Je suis vraiment désolé pour hier soir, mais j’ai vraiment pas pu
faire autrement. C’était beaucoup trop risqué.
– Tu
as très bien réagi. Ne commets surtout pas d’imprudences. Non,
mais t’imagines si on pouvait plus se voir du tout ? Je le
supporterais pas, Benjamin. Ça, c’est quelque chose que je ne
supporterais pas.
– On
n’en est pas là…
– J’espère
bien…
– Non,
non… T’inquiète pas ! Il s’agit juste d’éviter de se
voir pendant trois-quatre jours. Le temps qu’elle se rassure. Que
ses soupçons se dissipent. Bon, mais vous avez fait quoi alors, du
coup, avec Alex ? Vous êtes rentrés ?
– On
s’est tâtés… Et puis, finalement, non, on est restés. Et on
l’a pas regretté. Ah, non alors ! Parce que je peux te dire
que t’as loupé quelque chose.
– Quoi
donc ?
– Eugénie,
la petite serveuse, la fille du patron… Elle est chaude comme la
braise.
– Qu’est-ce
qui s’est passé ?
– Je
te raconterai… Quand on se verra. Ce serait trop long. Mais ça
vaut son pesant d’or, je t’assure. Tant et si bien qu’on va
rester là, cet après-midi. Et peut-être même la nuit prochaine.
– Je
vais voir…
– Tu
vas voir quoi ?
– Si,
éventuellement, je peux pas venir vous rejoindre.
– Sûrement
pas, non. T’es inconscient ou quoi ? T’as envie que ta bonne
femme découvre le pot-aux-roses ?
– Si
je manœuvre bien…
– Ah,
non, Benjamin, non. C’est hors de question. Ce serait complètement
irresponsable. Il y aura d’autres occasions n’importe comment.
Allez, file ! Va travailler ! On se rappelle dans la
journée.
– Je
t’aime…
– Moi
aussi.
Et
elle a raccroché.
– Il
se fout de ma gueule, hein ! Il se fout vraiment de ma gueule.
Soi-disant qu’il faut, par sécurité, qu’on reste quelques jours
sans se voir. Je lui parle d’Eugénie. Je l’allèche avec et là,
comme par enchantement, toutes les difficultés sont aplanies. Il est
prêt à nous rejoindre dans la minute qui suit. T’en penses quoi,
toi ?
– Que
sa nouvelle conquête n’est pas, à ses yeux, aussi importante que
ça puisqu’il était disposé à te la sacrifier pour venir passer
la soirée avec toi.
– La
passer avec Eugénie, tu veux dire, plutôt, oui ! Bon, mais
importante ou pas, c’est pas mon problème. Je sais ce qu’il me
reste à faire.
– C’est-à-dire ?
– Que
je vais sûrement pas passer mon temps à attendre qu’il soit
disponible pour moi. Je vais me trouver quelqu’un d’autre. Et
jouer sur les deux tableaux.
Proserpine
nous attendait en bas.
– Vous
allez sans doute me trouver terriblement insistante, mais on a été
interrompus hier soir et j’aurais vraiment aimé qu’on puisse
poursuivre notre conversation. Je tiens beaucoup à écrire ce livre
et si je ne dispose pas d’éléments suffisamment…
Alyssia
l’a interrompue.
– Je
vous ramène si vous voulez. On pourra discuter comme ça. Allez,
montez !
Je
me suis un peu attardé. Je suis remonté dans la chambre.
Redescendu. Sur la terrasse du petit déjeuner, maintenant déserte,
Eugénie remettait un peu d’ordre. Un coup de torchon par ci, une
chaise remise en place par là. Je me suis approché.
– Je
voulais vous dire…
Elle
n’a pas relevé la tête.
– Merci
pour tout-à-l’heure.
Toujours
pas.
– Et
aussi pour hier soir.
Elle
m’a jeté un bref regard, vaguement confus.
– Et
merci à vous.
– J’ai
beaucoup, mais alors là vraiment beaucoup apprécié.
Elle
a plongé ses yeux dans les miens.
– Moi
aussi !
Et
elle s’est enfuie.
Enfin une initiative.
RépondreSupprimerIl a dit bonjour et merci à une autre.
C'est une avancée.
C'est un début. Il y aura d'autres avancées. Et d'avancée en avancée (entremêlées parfois de retours en arrière…
RépondreSupprimerTrès prometteur...
RépondreSupprimerQuelque chose est en train de s'enclencher…
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