mardi 3 juillet 2018

Alyssia, ma femme (16)


Elle a agité la main jusqu’à ce que la voiture de Benjamin ait disparu derrière le petit bosquet.
– Bon, ben voilà…
On est lentement revenus vers l’hôtel. Le gravier crissait sous nos pieds.
– C’est rassurant quand même…
– Quoi donc ?
– Qu’il t’ait demandé de lui servir d’alibi pour sa femme. Ça prouve qu’il a pas l’intention de mettre un terme, nous deux. Au moins dans l’immédiat.
– C’est ta grande hantise, ça, hein !
– Il y a de quoi, non ? Parce que c’est le régime de la douche écossaise avec lui. Il te laisse sans nouvelles pendant des semaines et puis il réapparaît d’un coup, comme ça, sans crier gare, plus tendre et passionné que jamais. Non, j’avoue que j’ai un mal fou à le cerner. Qu’est-ce qu’il veut au juste ? Qu’est-ce qu’il ressent vraiment pour moi ? Mystère. Tiens, viens, on va aller s’asseoir un peu là-bas.
Sous la tonnelle. Sous la glycine. Elle y a joué un moment à pousser un caillou, du bout du pied, perdue dans ses pensées.
– Il y a des moments, je me dis que, si ça tombe, c’est purement stratégique tout ça. Qu’il me met sur des charbons ardents exprès. Pour me déstabiliser. Pour me rendre complètement accro. Et puis, il y a d’autres moments, je me dis que je vais chercher midi à quatorze heures, que c’est bien plus simple que ça : il est beau, il est séduisant, il a toutes les nanas qu’il veut à ses pieds. Je suis une parmi d’autres. Parmi beaucoup d’autres. Le mieux que j’aie à faire, c’est de prendre ce qu’il me donne. Quand il me le donne. Sans me poser tant de questions. Sans exiger quoi que ce soit. Sans revendiquer quoi que ce soit. Il finirait par se lasser. Et je finirais par le perdre. Non ? Tu crois pas ? Qu’est-ce t’en penses, toi ?
– Que tu l’as dans la peau.
– Oui. Non. Je sais pas en fait. J’ai besoin de lui, ça, c’est sûr. D’être dans ses bras. De caresser sa peau. D’entendre ses mots. D’avoir sa queue. Qu’elle gicle en moi. Est-ce que ça veut dire pour autant que je suis…
Elle s’est interrompue.
– Amoureuse ? C’est le mot que tu cherches ?
Elle s’est récriée.
– Non. Ça, non ! Je crois pas.
– Bien sûr que si ! Ça se voit comme le nez au milieu de la figure. Tu devrais l’admettre, une bonne fois pour toutes. Tu te sentirais beaucoup mieux.
– Oui, mais…
– Mais moi ? Disons, si ça peut te rassurer, que je suis convaincu qu’on peut, sans problème, aimer deux personnes à la fois. Au moins…
– Tu es vraiment…
– Exceptionnel, je sais. Tu n’en as jamais douté, j’espère !

On était en train de s’installer pour déjeuner, à midi, quand son portable a sonné.
– Tu réponds pas ?
– Non. C’est l’autre, là, le Gauvin du quatorze juillet.
Qui a laissé un message qu’elle a écouté en soupirant.
– Il est lourd, mais lourd !
– Il veut quoi ?
– Devine !
– Et apparemment, t’en es pas.
– Pas bien, non. Pas du tout, même. C’est pas que j’aie quoi que ce soit contre lui. Il est agréable. Il baise bien. J’ai passé de bons moments avec. Mais bon… Il vient d’y avoir Benjamin. Je suis encore toute pleine de lui. Et Benjamin, c’est Benjamin. Alors Gauvin !

On a passé l’après-midi à la piscine.
– Que je rentre quand même un minimum bronzée.
Et j’ai fait mine de me plonger, tandis qu’elle somnolait, dans la lecture d’un polar-alibi.
Elle a éclaté de rire.
– T’es vraiment pas discret. Tu les bouffes carrément des yeux, les nanas, oui ! T’es pas le seul, remarque ! Parce qu’il y a en a un, là-bas, à droite.
– Qu’arrête pas de te mater… Normal. Une belle femme comme toi.
– Oui, oh, ben, en l’occurence, c’est plutôt après toi qu’il en a.
– Moi ? Il est où ?
– Le maillot vert. Sur le transat rouge. Vas-y, si tu veux, hein ! Je suis sûre qu’il y aura mèche avec lui.
– Oui, mais non. Merci. Sans façons.
– Ça vaut mieux. Parce qu’il serait pas déçu du voyage, le pauvre.
– Qu’est-ce t’en sais ?
– J’en sais que je t’ai vu à l’œuvre, pas plus tard que ce matin, avec la queue de Benjamin. Tu savais pas par quel bout la prendre, c’est le cas de le dire. On aurait dit que t’avais peur qu’elle te morde. Ou qu’elle te saute à la figure. Vous êtes trop, vous, les mecs, n’empêche, avec ça. Vous en faites toute une histoire. Pour nous reluquer ensemble, nous, les nanas, ah, ça, vous vous faites pas prier. Vous êtes les premiers à réclamer. Mais quand il s’agit de nous offrir la réciproque, il y a plus personne.

Dans le lit, elle s’est tournée. Retournée. Dix fois. Vingt fois. A fini par rallumer son Blackberry. Fait défiler les photos.
– Si seulement il avait la bonne idée d’appeler, mais faut pas rêver. À cette heure-ci, il y a pas de risque.
Elle a soupiré. L’a éteint. Continué à se retourner encore et encore.
– Rien que de penser à lui, non, mais comment il me donne envie, ce salaud !
Elle l’a repris. Fait encore défiler.
– Celle-là ! C’est celle que je préfère.
On l’y voyait en pied, tout sourire, la queue à demi dressée.
– Tiens-le moi ! Que j’aie les mains libres ! Un peu plus haut… Oui. Là. Comme ça ! Génial.
Ses mains ont moutonné sous les draps, l’une à hauteur des seins, l’autre de la chatte. Son souffle s’est fait plus court.
– Oh, oui, Benjamin ! Que c’est bon ! Que c’est bon !
Elle a rejeté draps et couvertures au pied du lit, s’est ouverte au large. Ses reins se sont creusés. Sa tête s’est affolée sur l’oreiller. Un doigt a tourbillonné sur son bouton. Son autre main l’a obstinément lissée sur toute sa longueur. Elle a imploré…
– Sa bite ! Change la photo ! Donne-moi sa bite. Vite, mais vite !
Ses yeux s’y sont rivés.
– Je vais jouir… Je jouis… Oh, Benjamin !

4 commentaires:

  1. Bon bon bon.... Que va-t-il se passer au prochain épisode lol ?

    RépondreSupprimer
  2. Au prochain épisode? Ils seront rentrés de vacances. Et Alex aura rendez-vous avec Séverine, la femme de Benjamin, mais chut…

    RépondreSupprimer
  3. Merci. Je compte sur votre discrétion.

    RépondreSupprimer