Bon alors qu’est-ce qu’on faisait ? On restait passer la
nuit là ou on retournait là-bas ?
– Ce
que tu veux. Tu choisis.
– Je
suis partagée. Parce que c’est vrai qu’ici, chez vous, on a tout
le confort. Et on est tranquilles. Pas de voisins à proximité
immédiate. Mais, d’un autre côté, ça a aussi ses avantages, les
voisins. Parce qu’on peut les entendre et ils peuvent nous
entendre. Surtout au début, comme ça, c’est pas mal, moi, je
trouve, de prendre ses marques. De savoir qui il y a, à droite, à
gauche, au-dessus, en dessous. Si c’est des tout seuls. Ou si c’est
des couples. S’ils s’engueulent. S’ils s’envoient souvent en
l’air. Si elle braille comme une possédée, la fille, quand elle
jouit. Enfin plein de trucs, quoi !
– Sans
compter qu’il y a l’hôtel juste en face.
– En
plus, oui !
– Bon,
ben allez, en route alors !
On
s’est pris des pizzas au passage. Des quiches. Des sodas.
– Tout
ce qui va bien, quoi !
Et
on s’est retrouvés, sur le palier, en compagnie d’un type brun,
frisé, avec qui on a échangé un rapide bonjour et qui s’est
engouffré dans l’appartement d’à côté.
– Vous
voyez qu’on a bien fait finalement ! Parce que le mec de la
fille de droite, on sait à quoi il ressemble comme ça, maintenant…
– C’est
peut-être pas son mec… C’est peut-être juste UN mec.
– Qu’a
les clefs ? Ça m’étonnerait. Oui, oh, de toute façon, dans
un cas comme dans l’autre, il fera pas long feu. C’est le genre
de nana qu’aime le changement. Ça se voit tout de suite, ça !
Elle
a dévoré trois parts de pizza, assise sur le radiateur, en jetant
de fréquents coups d’œil, par la fenêtre, sur ce qui se passait
au-dehors.
– Bon,
mais allez, il y a plus qu’à se coucher. Qu’est-ce vous voulez
faire d’autre ?
Et
elle s’est déshabillée.
– Heu…
Clorinde…
– Quoi ?
Qu’est-ce qu’il y a ?
– Je
te signale quand même que les volets sont pas fermés, qu’il y a
pas de rideaux et que t’es en pleine lumière.
– Oui,
je sais. Et alors ? C’est l’hôtel en face. Ils sont de
passage. Ils me connaissent pas et je les connais pas.
Elle
a tranquillement continué. Le soutien-gorge. La culotte. Qu’elle a
jetés sur une chaise.
– Alors
s’il y en a qui veulent mater, qu’ils matent ! C’est pas
moi que ça dérange. Et si leur légitime peut en profiter…
Elle
a tourné, viré, entièrement nue, dans la pièce, farfouillant dans
son sac, allant se servir un verre d’eau, vérifier que le verrou
était bien mis, que le gaz était fermé.
Et
elle venue se glisser dans le lit à mes côtés.
– Là…
Et maintenant chuuut ! On écoute.
Il y
avait de la musique, pas très fort, quelque part. Au-dessus, à
droite, de l’eau coulait. Quelqu’un a crié. « Bon, cette
fois, ça suffit, Mathias, tu vas te coucher… » À côté, il
y a eu un murmure de voix. En sourdine.
– C’est
du papier à cigarettes, les cloisons, là-dedans ! Je suis sûre
que si on y collait l’oreille, on pourrait entendre tout ce qu’ils
se disent.
– Et
t’en crèves d’envie…
– Non,
mais ça va pas ? Pour qui vous me prenez ? Enfin, si !
Quand même un peu…
– Beaucoup,
oui, tu veux dire…
– Attendez !
Écoutez ! Il est juste de l’autre côté, leur lit. On est
tête à tête.
– Aux
premières loges en somme…
– Encore
faudrait-il qu’ils y mettent un peu du leur…
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