– Bon,
mais alors qu’est-ce qu’elle fout ? Elle se connecte ?
– Qui
ça ?
– Ben,
Emma, tiens ! Qu’on lui raconte notre petite expédition de
tout-à-l’heure. Elle va adorer. En attendant, en douce que sur ce
coup-là, on n’a pas vraiment assuré. On a détalé comme des
lapins. Comme si on avait le feu au cul. Non, ce qu’il aurait
fallu, c’est s’attarder au contraire. Pour bien en profiter.
Parce que pas besoin de vous en faire que, même que vous m’ayez
empêchée de beugler, ils se sont forcément rendu compte de quelque
chose. Vu comment vous étiez rouge en sortant de là-dedans…
– Tu
peux parler, toi ! T’étais pas mal non plus dans ton genre.
Écarlate. Et tout échevelée.
– C’est
pour ça ! À tous les coups, ils ont dû croire qu’on y avait
baisé dans la cabine. Et on serait restés à se balader entre les
portants, je serais retournée essayer, on aurait eu droit à tout un
tas de regards pleins de sous-entendus, de chuchotements derrière
notre dos. Des quantités de trucs. Comment je me serais régalée,
moi ! Pas vous ? Remarquez, rien nous empêche d’y
retourner, hein ! D’autant que je l’ai pas eu mon cadeau,
finalement ! Ah, la v’là, Emma ! Ça y est ! La
v’là ! Salut, toi ! Ben, approchez-vous ! Qu’elle
vous voie ! Plus près ! Alors, qu’est-ce tu deviens ?
– Oh,
ben tu sais, moi, c’est photos, photos et encore photos…
– Et
beaux mecs, beux mecs et encore beaux mecs.
– T’as
tout compris.
– Oui,
ben en attendant, ça fait quand même un sacré moment que tu m’as
pas envoyé d’échantillons.
– Ça
peut s’arranger.
– J’y
compte bien. Et de jolis petits specimens, hein ! Tu connais mes
goûts !
– Oh,
pour ça, oui ! Bon, mais et toi ? De ton côté, qu’est-ce
tu deviens ?
– Moi ?
Ça baigne. Je suis toujours chez lui, là. On s’entend comme
larrons en foire. Tu verrais comment on s’éclate tous les deux. On
se tape de ces délires. Comme là, tout-à-l’heure… Figure-toi
qu’il a voulu m’offrir une robe… Et moi, tu me connais. Les
cabines d’essayage, ça me rend folle.
– Ah,
ça, je suis bien placée pour le savoir…
– Du
coup, à peine on a été bouclés là-dedans que ça m’a prise. Et
comme, en plus, lui, il s’y est mis aussi. Et que c’est trop
excitant la façon dont il se le fait…
– Je
vois… T’as mis la révolution dans la boutique, expansive comme
tu es.
– Oui.
Enfin, non. Ça a failli. Seulement failli. Parce qu’il m’a
plaqué la main sur la bouche. De toutes ses forces. Sauf que, moi,
d’instinct, j’ai planté les dents dedans.
– Aïe !
– Tu
peux le dire ! Comment je l’ai arrangé, le pauvre !
Tiens, regarde !
Elle
m’a pris la main, l’a approchée de l’œil de la caméra.
Emma
a émis un petit sifflement.
– Eh
ben dis donc ! Tu fais pas les choses à moitié, toi, quand tu
t’y mets.
– Surtout
que là, il est perdant sur toute la ligne. Non seulement il a pas eu
le temps de se finir, mais maintenant, en plus, vu l’état dans
lequel je la lui ai mise, il peut plus trop se servir de sa main.
– Prête-lui
la tienne ! Tu lui dois bien ce petit dédommagement, non ?
Après tout ce qu’il vient de faire pour toi.
– Oui.
C’est vrai. T’as raison. C’est la moindre des choses. S’il a
rien contre, bien sûr !
Hein ?
Ah, mais non ! Non ! J’avais rien contre. Rien du tout.
Au contraire.
– Dans
ces conditions…
Et
elle me l’a résolument sortie. Elle me l’a empoignée et elle a
entrepris un lent mouvement de va-et-vient. Sur l’écran, Emma
s’était rencognée dans son fauteuil. Ses lèvres étaient
légèrement entrouvertes. Ses narines palpitaient. Son coude
bougeait.
Clorinde
a accéléré le mouvement. Vite. De plus en plus vite. Je me suis
répandu.
Sur
l’écran, Emma a gémi.