mardi 18 septembre 2018

Alyssia, ma femme (27)


Benjamin m’a arrêté, posé la main sur l’avant-bras.
– C’est celle de droite, Camille. La plus grande. Tu vois ? Comment tu la trouves ?
– Super canon, il y a pas à dire.
– Oui, hein ! J’ai craqué. Le moyen de faire autrement ? Mais attends, viens ! On va aller l’attendre dehors. Elle a bientôt fini. Qu’on la perturbe pas dans son travail. Elle a horreur de ça.

Il a fait les présentations.
– Camille… Alex…
Elle m’a fait claquer la bise, s’est attablée avec nous.
– Que des gros lourds ! Il y a des jours comme ça…
– C’est de ta faute ! T’as qu’à pas être si mignonne.
– Tu veux que j’y fasse quoi ? Que je me barbouille de vitriol ?
– Ah, non, malheureuse !
– J’aurais la paix au moins…
– Ça, c’est pas sûr !
– Tu sais de quoi je rêve, là, maintenant ? D’une bonne douche. Pour me laver de tout ça…
– Rien de plus facile. On va chez moi. Séverine rentre pas avant sept heures.

– Je t’ai emprunté ton peignoir.
– Je vois, oui !
Elle s’est ébrouée. En fines gouttelettes qui se sont éparpillées au hasard.
– En attendant, qu’est-ce que ça fait du bien !
Benjamin s’est levé, est passé derrière elle, lui a piqueté la nuque de petits baisers.
– Chut ! Veux-tu être sage !
– J’ai pas envie.
– Devant ton ami. Tu n’as pas honte ?
– Même pas.
Le cou.
Il s’est pressé contre elle. Elle s’est abandonnée.
Il a glissé une main sous le peignoir. Une main qui a moutonné à hauteur des seins. Qui s’est aventurée plus bas. Encore plus bas. Le peignoir s’est entrouvert.
J’ai poussé un cri de stupéfaction.
Il y avait… Elle avait… On voyait… Une bite et une paire de couillles.
Ils ont éclaté de rire. Tous les deux. De bon cœur.
– Ah, oui, ça surprend, hein !
Camille a refermé le peignoir.
– C’est tout pour aujourd’hui ! Et, de toute façon, puisque c’est comme ça, puisqu’il y a que des gros pervers dans cette maison, je m’en vais.
Ce qu’il a fait aussitôt après avoir renfilé sa robe.

– Il est vraiment fâché ?
– Penses-tu ! C’était concerté tout ça. On était de mèche. Bon, ben voilà ! Maintenant, tu sais.
– Comment vous m’avez eu !
– C’était le but. Elle adore ça, Camille, surprendre son monde là-dessus. Et faut reconnaître qu’avec toi, c’était particulièrement réussi. T’aurais vu ta tête ! Elle s’est délectée de voir ta réaction, je la connais. Et je peux te dire que j’ai pas fini d’en entendre parler.
– Je peux te poser une question ?
– Tout ce que tu veux.
– C’est purement sexuel avec lui ou bien…
– C’est beaucoup plus que sexuel. C’est un peu mon double, Camille. Jamais je ne me suis senti aussi compris, reconnu et accepté. Non, ce qu’il y a maintenant, c’est que pour Alyssia je sais vraiment pas quoi faire.
– C’est-à-dire ? Tu envisages de mettre un terme ?
– Oh, non, non. Pas du tout. Non. Au contraire. Seulement j’ai bien peur…
– Que ce soit elle qui le fasse. Alors ça, c’est pas exclu. Ça l’est même de moins en moins, dans le contexte actuel.
– Elle supporte pas l’idée que je puisse avoir quelqu’un d’autre. C’est ça, hein ?
– Ce qu’elle supporte pas, surtout, c’est que tu la prennes pour une conne. C’est de pas savoir sur quel pied danser avec toi.
– Tu crois qu’il faut que je lui parle ?
– Je crois pas. Je suis sûr.
– Il y a un risque quand même, non ?
– Évidemment ! Mais infiniment moindre, à mon avis, que si tu joues carte sur table. Elle appréciera.
– Je lui dis aussi que Camille, en réalité, c’est…
– Quand on dit la vérité et qu’on ment en même temps, ça le fait pas. Ça le fait jamais.

Je me suis levé.
– Bon, j’y vais. Je te laisse.
– Tu veux pas rester un peu ? Que Séverine te trouve là en rentrant. Ça la mettra de bon poil. Ça changera pour une fois.
– C’est la soupe à la grimace ?
–Et pire encore. Elle desserre pas les dents de toute la soirée. Elle se contente de balader partout son petit air : « Je dis rien. Je demande rien, mais je sais où t’as passé l’après-midi. Et avec qui. On me la fait pas à moi. »
Il a soupiré.
– Des fois j’aimerais encore mieux qu’on s’engueule.
– Qu’est-ce qu’elle sait au juste ?
– Peut-être tout. Peut-être rien. J’ai décidé de plus me poser la question. D’arrêter de me faire des nœuds au cerveau. Parce que ça change rien. Parce que Séverine, c’est quelqu’un qu’a un besoin viscéral de te faire la gueule. Qu’il y ait des raisons ou qu’il y en ait pas. Elle porte ça en elle. Faut qu’elle soit malheureuse. Que tout aille de travers dans sa vie. Et qu’elle en fasse porter la responsabilité à quelqu’un. Moi, en l’occurrence. Je suis en première ligne. Forcément.
Il a encore soupiré. Un soupir à fendre l’âme.
– J’en ai marre, par moments, mais j’en ai marre ! Quelle idée j’ai eue d’aller l’épouser. Non, mais quelle idée ! Ah, je t’assure que si c’était à refaire…
– Ça peut se défaire…
– Je sais bien, oui, mais…
Au-dehors, les graviers ont crissé.
– La v’là !

Elle a jeté ses clefs sur la petite console, dans l’entrée.
– Alors, les garçons, ça va comme vous voulez ?
Ça allait, oui !
– Qu’est-ce vous avez fait de beau ?
– Oh, rien ! Rien de spécial.
Derrière lui, le peignoir était resté par terre. Elle l’a ramassé, porté à ses narines et elle lui a jeté un regard furibond.
Qu’il n’a pas vu.

4 commentaires:

  1. C'est plutôt bien parti pour qu'il finisse avec l'amant de sa femme. Il passe de plus en plus de temps avec lui. Lui se sont découverts bi tous les deux.

    Finalement elle va se retrouver seule à chercher des mecs sur le net.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Pas forcément, non. Il peut encore y avoir toutes sortes de rebondissements.

      Supprimer
  2. C'est incroyable, tous ces revirements. J'adore..

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il faut reconnaître que, pour le coup, c'était un peu… inattendu.

      Supprimer