Alyssia
avait passé l’après-midi avec Benjamin.
– Mais
pas à s’envoyer en l’air. À discuter.
– Et
alors ?
– On
s’est expliqués. À fond. Ça m’a fait un bien fou, tu peux pas
savoir…
– Un
peu quand même que je peux savoir, si !
– Du
coup, avant de rentrer, je suis allée jeter un coup d’œil sur
cette Camille. Depuis le temps que je voulais le faire. Et quand tu
la vois comme ça, belle comme un cœur, féminine en diable, t’as
vraiment du mal à y croire.
– Et
pourtant…
– T’as
eu l’occasion de constater, de visu je sais ! Vous êtes
sacrément devenus complices, Benjamin et toi, hein, n’empêche !
– Mais
qui c’est qu’a poussé à la roue ?
– En
attendant, tu sais ce qu’on a décidé ? C’est qu’on
allait faire cause commune, Benjamin, Camille et moi.
– Cause
commune ?
– Se
voir tous les trois ensemble, si tu préfères. Comme ça, au moins,
je resterai pas à me morfondre dans mon coin pendant qu’il est
avec elle. Enfin, avec lui. Et puis je t’avouerai que la situation
est loin de me déplaire. Et ce Camille non plus il me déplaît pas.
Il a quelque chose. Un charme fou, en fait. Non. Je suis vraiment
curieuse de voir comment il s’y prend. Et de les voir ensemble tous
les deux. Tu sais quoi ? Eh ben, ça tombe pile poil au bon
moment ce truc. Parce que ça commençait à s’affadir
sérieusement, Benjamin et moi. On allait droit dans le mur. Tandis
que là, il y a toutes les chances que ça relance la machine. Et pas
qu’un peu ! Sans compter qu’il y en a une qui va être aux
anges, c’est Eugénie. En plus !
– Et
moi, dans tout ça ?
– Oh,
toi, évidemment que t’as ta place, toi ! Comme d’habitude.
Manquerait plus que ça ! Et de toute façon, maintenant, c’est
le genre de choses qu’il serait absolument hors de question que
j’envisage sans toi. D’ailleurs, il serait peut-être temps que
t’ailles te préparer. C’est ton rôle d’aller faire quelques
petits repérages avant, non ?
– Ah,
parce que…
– On
attaque dès ce soir, oui. Allez, file !
J’ai
commencé par me mettre à la recherche d’Eugénie. Sur qui j’ai
fini par tomber nez à nez, après un long périple, au détour d’un
couloir. Elle a sursauté, fait un bond en arrière.
– Vous
m’avez fait peur.
– C’était
pas le but. Désolé.
– On
vous a changé de chambre. Elle en a voulu une avec deux grands lits,
votre femme. Parce que quatre vous serez, cette nuit, à ce qu’il
paraît…
– Sans
compter qu’on aura de la visite.
Elle
n’a pas cillé.
– C’est
vrai qu’il y aura une surprise ?
– Et
une belle !
– C’est
quoi ?
– Ce
sera plus une surprise, si je vous le dis.
Elle
a pris un petit air enjôleur.
– Oh,
vous pouvez bien… Je vous ai donné mon tablier.
– C’était
un somptueux cadeau.
Elle
a eu un petit sourire ravi.
– Vous
avez aimé, c’est vrai ?
– Oh,
que oui ! Et c’est rien de le dire.
– Vous
savez qui j’ai mis dans la chambre à côté de la vôtre ? Le
couple de types.
– Ça,
par contre, c’est un joli petit cadeau que vous vous faites à
vous-même. Non ?
Elle
a haussé les épaules.
– Elle
sait bien, votre femme.
– Que ?
T’adores ça, les hommes entre eux ?
Elle
a soutenu mon regard.
– C’est
ce que je préfère.
– Alors
tu seras pas déçue, ce soir, tu verras…
La
salle de restaurant était pleine à craquer.
– Forcément,
avec les ponts.
Alyssia
s’est impatientée.
– Qu’est-ce
qu’elle fabrique, Camille ? Elle descend pas ?
Benjamin
a souri d’un air attendri.
– Oh,
alors elle ! Il lui faut toujours des éternités pour se
préparer…
Quand
elle a enfin fait son apparition, toutes les conversations se sont
interrompues. La salle a retenu son souffle, tandis qu’elle voguait
jusqu’à nous, majestueuse, royale, indifférente aux regards
admiratifs qui s’agrippaient à elles.
– Je
vous ai fait attendre.
– Oui,
mais ça en valait sacrément la peine.
En
nous apportant l’entrée, Eugénie s’est penchée à mon oreille.
– Qu’est-ce
qu’elle est belle, cette fille !
Avant
de regagner la chambre, on s’est offert une longue promenade
digestive dans les parages de l’hôtel.
– Il
y a rien qui nous presse.
Malgré
l’heure déjà bien avancée, il faisait encore une chaleur
étouffante.
– Ce
qui veut dire qu’il va falloir qu’on laisse la fenêtre ouverte.
– Et
que, du coup, on va empêcher tout l’hôtel de dormir.
– Tant
pis pour eux !
– Ou
tant mieux.
Les
regards des hommes et des femmes qu’on croisait se posaient
immanquablement sur Camille, s’y attardaient longuement. On se
retournait systématiquement sur elle.
– S’ils
savaient !
Benjamin
a fini par s’impatienter.
– Bon,
on remonte ?
– T’es
bien impatient !
Et
Camille a encore voulu cinq minutes.
– J’aime
trop ça comment on me regarde.
Puis
encore cinq autres. Puis dix.